Posté le 1 septembre 2020 par La Rédaction

Il est l’homme de l’ombre le plus connu du club. Devenu speaker en 1999, il officie surtout en tant que responsable logistique depuis 2006. En 14 années dans ce costume, il a déjà accompagné 150 joueurs et 10 coachs sous les couleurs burgiennes. Partez à la découverte d’un pan de l’histoire de la JL Bourg en compagnie d’Arafat Gorrab.

Arafat, quel fut pour vous le meilleur joueur jamais vu à Bourg ?

Mon cœur balance entre Devin Booker (passé par la JL Bourg entre janvier 2014 et mai 2015, ndlr) et Zachery Peacock (depuis 2015). Après, techniquement, je dirais Booker. C’est lui qui a fait la meilleure carrière parmi tous les anciens de la JL : il a été MVP de Pro A avec l’Élan Chalon, il joue maintenant en EuroLeague (avec le Khimki Moscou). Coup de chance : l’année dernière, je suis allé voir un seul match d’EuroLeague à l’ASVEL, c’était contre le Khimki Moscou. Je n’avais même pas regardé l’équipe en face, c’était un ami qui m’avait filé des places. Et sur le programme du match, en arrivant, je jette un œil au roster et je vois Devin Booker. Je me dis : « Mais non, ce n’est pas possible ! ». J’étais au quatrième rang et je crie son nom pendant l’échauffement : il me voit et me fait un grand sourire. Après son match, il n’est pas allé aux vestiaires mais il a traversé le terrain pour venir directement en tribunes me dire bonjour. Il est en EuroLeague et c’est nous qui l’avons lancé. C’était une pépite : Nancy ne s’en est pas occupé et Fred Sarre l’a fait venir chez nous en Pro B en janvier 2014. Il a changé la face de notre équipe, il remplaçait John Ofoegbu qui n’y arrivait pas et on est monté en Pro A avec lui. Il était extraordinaire. C’est un gars vraiment simple, pas chiant : il formait une belle brochette avec O’Darien Bassett et John Flowers.

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Arafat, avec Devin Booker, à l’Astroballe le 26 décembre 2019

Le plus marquant ?

Il y en a plein mais je dirais Cédric Ferchaud (2010/12). On avait tellement bien sympathisé que je suis carrément allé en vacances chez lui. Il nous avait invités et on a passé dix jours en Vendée. C’est un très bon gars, je suis toujours en contact avec lui. Ce n’est pas le seul, je discute encore avec Jason Forte (2013), Steven Smith (2014/15), Moses Sonko (2011/13)… Après, l’un de mes préférés est Zack Wright (depuis 2018). Il a joué l’EuroLeague, partout en Europe. Et ce gars-là, t’as l’impression qu’il n’a jamais joué plus haut que Bourg tellement il est cool. Il est détendu, il ne se prend pas la tête.

« Saddi Washington, c’était poker face, un peu comme Jordan »

Le plus drôle ?

Simon Darnauzan (2013/15). Le plus roublard, surtout ! Un vrai leader dans l’âme, aussi. L’année où l’on redescend en Pro B, s’il ne se casse pas la main en septembre en se faisant tomber un poids dessus, je pense que l’on se maintenait facile.

Le plus proche du public ?

John Flowers (2013/15). Il était capable d’aller s’asseoir en tribunes, de discuter avec quelqu’un, de chauffer directement les gens. Au VIP, il prenait le micro, il me disait : « Allez, laisse-moi faire » et il chantait des chansons. Il y avait aussi Branko Sindjelic (2003/07) mais dans un style complètement différent. Branko, c’est plus un politique, il va venir serrer des mains. Alors que Flowers était plus brut de pomme : il va faire l’idiot pour l’envie de faire l’idiot.

branko sindjelic et john flowers
Branko Sindjelic et John Flowers : deux méthodes différentes pour s’attirer les faveurs du public burgien (photos : Vincent Janiaud et Jacques Cormareche)

Le plus guerrier ?

Sans hésitation, Zachery Peacock. La preuve, c’est la finale de la Leaders Cup en 2019 contre Strasbourg (défaite 97-98, ndlr) : il avait tout donné sur les trois matchs, il était cuit à la fin du troisième quart-temps. Avec la chaleur et le peu de temps de récupération entre les rencontres, il a failli s’évanouir sur un temps-mort et je rappelle avoir dit au coach : « Tu es sûr que Zack va bien ? » Et pourtant, après s’être posé un temps sur le banc, c’est lui qui nous ramène dans le match.

Le plus charismatique ?

Saddi Washington (2003/05). C’était poker face. C’était un peu comme Michael Jordan : tout le monde savait que le dernier ballon était pour lui, tout le monde savait que c’était lui qui allait prendre le tir décisif et il arrivait quand même à passer n’importe comment entre deux joueurs pour shooter et marquer.

« Zachery Peacock, le joueur le plus exemplaire que j’ai vu à Bourg »

Le plus élégant ?

(Il hésite) O’Darien Bassett (2013/15). Il était vraiment très beau à voir jouer, il avait une faculté à faire des grands pas. Il avait fait du saut en longueur donc il parcourait le terrain en peu de foulées. Et ses jump-shots, c’était quelque chose.

Le plus spectaculaire ?

J’hésite entre Devin Booker et Youssoupha Ndoye (2016/19). Devin, car, un jour, il avait fait un dunk tellement énorme que j’ai sorti l’expression « Badaboum ! ». Maintenant, je mets des « Badaboum ! » dans tous les sens. Et Youssou, car il était plus grand, il avait plus d’envergure. Il arrivait à faire des alley-oops de folie. Je me rappelle d’une action énorme à Disneyland Paris, contre l’ASVEL, sur Alexis Ajinça. J’en oublie un, c’est Steven Smith ! Il était capable de sauter très rapidement, de dunker sur trois gars en même temps.

Le plus fêtard ?

John Flowers. En 2014, l’année où l’on monte, c’est la saison où l’équipe faisait le plus la fête. Et John, il n’a pas laissé sa part aux chiens.

Le plus professionnel ?

Zack Peacock. C’est impressionnant : il vient à l’entraînement 45 minutes avant pour shooter, il repart 45 minutes après. Quand le coach met des shootings exceptionnels, il y va tout le temps alors qu’il pourrait rester chez lui reposer ses genoux. Personnellement, je trouve cela très agréable de bosser avec lui. Quand il est arrivé chez nous, en 2015, il a débarqué avec cette histoire de bagarre à Cholet. Alors, après être allé le chercher à l’aéroport, je ne me suis pas démonté et je lui ai demandé : « On va travailler ensemble quelques années, je ne veux pas qu’on se prenne la tête pour des bêtises. Je sais que ça s’est mal passé à Cholet pour toi, je ne vais pas me baser sur ce que j’ai entendu, j’aimerais que tu me racontes ta version. » Et il me répond : « J’étais bien à Cholet mais il y a un autre joueur, Nick Minnerath, qui m’a saoulé une fois, je lui ai dit d’arrêter. Il m’a saoulé une deuxième fois, je lui ai dit d’arrêter. Il m’a saoulé une troisième fois, je lui ai mis une pêche. » Au moins, il a été honnête et tu comprends comment il fonctionne : s’il te dit que ce n’est pas le moment, ce n’est pas le moment. Il est très franc du collier et sincèrement, c’est le joueur le plus exemplaire que j’ai vu à Bourg.

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Comme ici en 2018 avec Zack Peacock, c’est Arafat Gorrab qui est chargé d’aller accueillir les joueurs étrangers à leur arrivée en France

Le plus fou ?

Jordan Theodore (2015). Une fois, il nous a dit : « Je ne peux pas venir à l’entraînement, j’ai ma tante à Paris qui est malade ». Puis le gars se prend en photo sous la tour Eiffel et poste ça sur les réseaux sociaux (il rit). Il était attendrissant car il était vraiment cool, mais il était fou-fou, c’était un électron libre. Il était difficile à maîtriser sur les à-côtés… Il fallait voir l’état de son appartement (il sourit)… Après, sur le terrain, on a gagné un paquet de matchs grâce à lui.

« Kareem Reid, c’était les Harlem Globe Trotters à Bourg »

Celui perdu de vue et que vous aimeriez revoir ?

Kareem Reid (2007/08). Mais je le reverrai. Le jour où j’irai à New York, j’irai forcément le voir. Il allait très bien dans le système de Jean-Michel Sénégal mais il était peut-être un peu trop en avance sur son temps. Tu l’aurais en ce moment, les caméras seraient toutes braquées sur lui. Il était un peu comme David Holston, en moins adroit. Il avait une telle façon de pénétrer, de faire des passes aveugles, de passer le ballon entre ses jambes… Le meilleur meneur spectacle vu à la JL. C’était un peu comme les Harlem Globe Trotters à Bourg. Ils se trouvaient bien avec Boakai Lalugba (2007/09), un très gros athlète venu du Libéria. Je me rappelle d’une anecdote à Besançon : il reste quatre secondes et on a un point de retard. Le coach annonce un système, les gars sortent du temps-mort et Kareem Reid va voir Boakai Lalugba et lui dit : « Non, non, on ne fait pas ce qu’il vient de dire. Je te lance la balle, alley-oop et c’est terminé. » Et voilà, il jette la balle, Boakai la claque au buzzer… C’était fou !

Celui qui avait le plus l’amour du maillot ?

J’aurais pu citer Jean-Luc Tissot (1992/02) ou Fabrice Serrano (1994/01, 2002/04) mais pour faire plus contemporain, plus en rapport avec ma fonction de responsable logistique, je dirais Jérôme Sanchez (2005/08, 2010/15) parce qu’il avait énormément de niaque et d’envie sur le terrain. Il a été formé chez nous, il est passé par l’ASVEL puis il est revenu nous faire cinq belles années.

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Jérôme Sanchez, ici le 21 décembre 2010, était le capitaine de Boulazac la saison dernière (photo : Vincent Janiaud)

Le plus perdu dans la vie quotidienne à Bourg ?

Christopher Roberts (2014/15). C’est l’une des rares fois où j’ai vu un gars ne pas s’intégrer du tout, être hors sujet sur toute la saison. Je n’arrivais pas à communiquer avec lui. Dès que je lui demandais un truc, il le prenait mal. Dès qu’il devait participer à une animation, il s’énervait : « Pourquoi toujours moi ?! » Il était impossible, ça n’a collé avec personne pour lui à Bourg. Mais c’est aussi comme ça que je me suis rendu compte de l’importance du choix des mots en Anglais, des conséquences qui pouvaient être entraînées par une mauvaise interprétation.

Celui qui est tombé amoureux de Bourg-en-Bresse ?

Philippe Braud (2012/17). Car il y est revenu s’y installer après sa carrière. Dans la même lignée, il y aura Maxime Courby (depuis 2015) dont je pense aussi vraiment qu’il voudra vivre ici quand il aura terminé.

« O’Darien Bassett aurait dû jouer en Pro A tous les jours »

Et inversement, celui qui a détesté Bourg ?

C’est rare que des joueurs détestent Bourg pour une seule et bonne raison : on est à dimension humaine. Il y a les bonnes personnes aux bons endroits dans le club. Par exemple, avec les nouveaux Américains, je sais pertinemment qu’il leur faut trois choses dans leur appartement en arrivant : Internet, un sèche-linge et une télé. Dès qu’ils ont ça, ils peuvent s’adapter. On est aux petits soins. Plein de joueurs, après leurs départs, viennent nous dire qu’ils étaient mieux à Bourg. C’était encore le cas de Youssou Ndoye cette année par exemple. Mais outre Chris Roberts, je dirais Jeremy Kelly (2006). Lui, il n’a vraiment pas aimé Bourg. Il n’est resté que deux mois car il ne supportait pas du tout la vie ici, il est rentré aux États-Unis. C’était impossible de communiquer avec lui, il n’avait pas envie d’être là, ça le faisait chier, il arrivait en retard aux entraînements.

Celui dont la trajectoire vous a surpris ?

Négativement, O’Darien Bassett. Pour moi, il aurait dû jouer en Pro A tous les jours. Mais il a fait n’importe quoi avec le fisc et il ne reviendra jamais en Europe (depuis son départ précipité de Bourg en mars 2015, il a évolué en République dominicaine, au Venezuela, en Corée du Sud, en Argentine, à Hong Kong et défendait la saison dernière les couleurs d’Al-Sharjah, aux Émirats Arabes Unis, ndlr). Et inversement, Jordan Theodore (passé ensuite par Francfort, Banvit, Milan, l’AEK Athènes, le Besiktas Istanbul et l’UNICS Kazan, ndlr). On savait qu’il était bon mais on ne pensait pas qu’il ne jouerait que des Coupe d’Europe en sortant de Bourg (il a notamment été élu MVP de la Champions League en 2017, vainqueur de la FIBA Europe Cup en 2016, vainqueur et MVP de la Coupe Intercontinentale en 2019, ndlr). Il a notamment disputé l’EuroLeague avec Milan, c’est une grosse surprise pour moi.

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La JL Bourg marquait sa troisième relégation d’affilée. Depuis, Jordan Theodore a empilé les honneurs individuels et les trophées collectifs, comme ici avec la Coupe de Turquie en 2017 (photos : Vincent Janiaud et Bandirma Basketbol)

Votre cinq majeur des joueurs passés par la JL Bourg ?

Je ne parle pas du niveau sportif, mais en terme de rapports humains. Et ce sera plutôt un six majeur avec Jesse Delhomme (2009/13), Philippe Braud, Cédric Ferchaud, Ludovic Chelle (2006/09), Jérôme Sanchez et Devin Booker. Je ne préfère pas mettre de joueurs évoluant encore chez nous à l’heure actuelle mais il y aurait pu y en avoir plusieurs aussi.

Le coach qui vous a marqué ?

Christophe Denis (2015/16). On avait une relation très agréable et c’était très facile de travailler avec lui. Je pourrais aussi dire Fabrice Courcier (2009/12) avec qui j’ai apprécié bosser pendant trois ans. Et inversement, celui avec qui j’ai eu le plus de mal à travailler, c’était Didier Dobbels (2008/09). Avec lui, c’était tout pour le sportif, il se foutait de tout ce qu’il y avait à côté alors que le nerf de la guerre, ça reste quand même les sponsors. Tu ne peux pas les mettre de côté alors que ce sont eux qui injectent de l’argent dans le club, qui font que tu as ton salaire à la fin du mois.

« Et là, morts de rire, les joueurs me disent qu’Ofoegbu n’ose pas venir me parler »

Une anecdote que vous n’avez jamais racontée ?

John Ofoegbu (2013) m’a tout fait ! On lui a filé une Kia Venga et pour se garer dans sa maison à l’Alagnier, il fallait rentrer en marche arrière. Au bout de 15 jours, il avait déjà défoncé le portail et rayé tout le côté droit. Deux semaines plus tard, il avait refait tout l’autre côté. En 5 mois, il avait abîmé les quatre faces de sa voiture : il en a eu pour 7 000 € de réparations !
Une autre : un jour, on joue à Évreux et je le vois arriver au shooting avec des chaussures de running. Là, il me dit que ses chaussures se sont cassées. En gros, la semelle s’était décollée. Il était parti en déplacement sans chaussure de rechange ! Heureusement, j’ai toujours du fil, une aiguille, de la colle et du scotch avec moi en déplacement. Alors, à l’hôtel, je lui rafistole sa chaussure et je me rappellerai toujours que l’entraîneur, Fred Sarre, me voit et me dit : « Mais qu’est-ce que tu fais ?! ». Du coup, il est allé le démonter derrière : « Tu n’es pas professionnel, un vrai pro a au moins deux paires différentes », etc. Alors que je lui avais déjà mis une brasse avant, bien que ce ne soit pas mon genre. Bref, je lui ai scotché sa semelle pour bien que la glue prenne et il a disputé deux matchs avec cette paire de chaussures. Il a quand même pris le risque de jouer un autre match avec ! Le pire, c’est le lendemain… On prend un TER Évreux – Paris puis le TGV Paris – Bourg. On change de gare à Paris et dans le métro, tous les joueurs sont morts de rire en me regardant. Ils me disent qu’Ofoegbu n’ose pas venir me parler. En fait, il avait oublié son sac à dos, avec ses chaussures, sur le quai de la gare à Évreux ! On a envoyé le chauffeur du bus les récupérer, ça lui a coûté 20 € de colis.
Ou la meilleure… Il avait sympathisé avec un ami à moi, Prince, un Nigérian, comme lui. Un soir, Prince vient le chercher à la sortie de l’entraînement pour l’emmener au restaurant. Et Ofoegbu, au lieu de suivre la voiture de son pote, voit une autre voiture qui part : celle de Fabrice Pacquelet, le directeur du club, qui rentrait à Polliat. Quand Fabrice est arrivé chez lui, il a vu une voiture JL qui l’avait suivi, avec John Ofoegbu au volant réalisant enfin sa bêtise (il rit). Ce gars-là était toujours dans la Lune, c’était extraordinaire. Mais il n’était pas méchant, il était très agréable à vivre en dehors. C’était un monstre athlétique, une bête, mais il était perdu dans le système de jeu de Fred Sarre, il s’est pris pas mal de brasses.

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John Ofoegbu lors du fameux match à Évreux le 4 octobre 2013 (photo : Vincent Janiaud)

Le match le plus marquant ?

Contre Denain, en 2017, où l’on remonte en Pro A. On savait que l’on pouvait être champion le soir-même mais il y avait beaucoup de « si » : il fallait que l’on batte Denain et que Fos perde à domicile contre Charleville, sachant qu’on recevait Fos quatre jours après lors de notre dernière rencontre à domicile et qu’ils attendaient ce match pour nous passer devant sur le fil. Denain était très accrocheur, on avait du mal à s’en débarrasser. Et à trois minutes de la fin, mon collègue Flo (Florian Boissot, un commercial), vient me voir et me dit : « Arafat, faut que tu me réveilles la salle et les joueurs car on peut monter en Pro A directement, Fos est en train de perdre de 7 – 8 points. » À ce moment-là, je prends le droit de le dire à toute la salle, et je ne sais pas si je pouvais : « Mesdames et Messieurs, Fos est en train de perdre. Nous sommes virtuellement en Pro A mais il faut gagner ce soir. » Là, t’as les gens qui se réveillent, tous les joueurs qui me regardent, même les Ricains, et tu sens dans leurs yeux qu’ils partent à la guerre. Je me souviens des regards déterminés de Zack Peacock, de Philippe Braud… On a lutté jusqu’à la fin et on gagne sur trois lancers-francs de Garrett Sim (88-85). Ensuite, il y a eu l’attente du résultat de Fos qui était interminable. Tous les joueurs étaient sur le terrain, on patientait et au moment de l’annonce de leur défaite (72-81) c’était un moment fort. Sinon, je citerais également la finale des playoffs de Pro B en 2014 contre Poitiers. C’était notre bête noire, ils nous ont battus en demi-finale en 2008 et 2009. Avec Jean-Michel Sénégal et Didier Dobbels, c’étaient des saisons marquantes. Je garde le souvenir de la belle de la demi-finale en 2008 que l’on perd chez nous contre le PB86 (86-92) et c’est moi qui me retrouve à éteindre les lumières de la salle. Comme dans les films… Du coup, c’était fort de battre Poitiers car ils nous ont fait la misère avant quand même.

« Un coup de pied au cul à Pierre-Yves Guillard »

Le match le plus désagréable à speaker ?

Un Bourg – Nantes dans l’ancienne salle (le 21 octobre 2008, victoire 71-68, ndlr). Ce jour-là, il faisait très chaud, il y avait eu de l’orage. Les gens sont tous arrivés mouillés et la condensation a fait que le parquet était intenable. Ça glissait dans tous les sens. Les entraîneurs et les joueurs avaient tous des serviettes dans les mains. À chaque fois que ça glissait, ils allaient sur le parquet et essuyaient. C’était vraiment désagréable car les arbitres pétaient un plomb. C’était une vieille salle, tu ne pouvais rien faire contre la condensation. Bon, au moins, ça n’arriverait plus dans la nouvelle salle. J’en ai un autre, toujours en Pro B : la réception des JSA Bordeaux de Boris Diaw pendant le lock-out NBA (le 5 novembre 2011, victoire 86-70). Ce jour-là, on me téléphone et on me dit : « Arafat, le panier est cassé ». Dans l’ancienne salle, c’étaient deux paniers artisanaux. En fait, le fil du palan, qui tenait le panier à la bonne hauteur, s’était cassé. Le jour du match, un samedi (il souffle). C’était l’enfer. Bordeaux ne s’est entraîné que sur un seul panier, ils ont été sympas. Nous, on ne s’est même pas entraîné. On a contacté une société, la métallerie Giroud de Vonnas, et je crois qu’on a fini de réparer le panier à 16h. À seulement quatre heures du match, alors qu’on savait qu’on jouait à guichets fermés, qu’il y avait Boris Diaw en face. C’était vraiment un gros stress. Autrement, je pourrais citer tous les matchs que l’on a perdus de 30 points à domicile. C’est vraiment très dur à animer. Et encore, à Amédée Mercier, on avait l’avantage d’avoir une salle qui faisait énormément de bruit, qui résonnait. On n’a pas non plus les plus grands supporters de la terre, on n’est pas le RC Lens ou l’Olympique de Marseille, mais on a un public de connaisseurs à Bourg. Les gens encourageront toujours à partir du moment où les joueurs mouillent le maillot, quand bien même l’équipe adverse est plus forte. Par exemple, la réception de Dijon la saison dernière (73-101, le 7 décembre 2019, ndlr) : ils sont plus forts, il n’y a rien à dire. Ils vont même applaudir dans ce cas. Mais oui, chauffer la salle à -30, c’est dur.

Le plus beau match vu à Bourg ?

Je n’étais pas au micro. Ce n’était pas à Bourg, c’était à Dijon. Quand on perd chez eux après trois prolongations (113-117, le 3 avril 2015, ndlr)… Pour moi, c’est la référence des matchs. Jean-Luc Tissot était le coach, Jordan Theodore fait un match de malade (31 points, 6 rebonds et 10 passes décisives), il met tous ses lancers-francs (18/18, un total inégalé dans toute l’histoire de la Jeep ÉLITE, ndlr). C’était du coup pour coup. C’est le match qui m’a marqué le plus. Vivre trois prolongations sur le banc de touche, 55 minutes de jeu, c’était impressionnant.

La plus belle ambiance vue à Bourg ?

Le match contre Fos-sur-Mer, en 2017, où l’on fête le titre de champion de Pro B (victoire 94-77). Il n’y avait plus d’enjeu mais les gens étaient tellement détendus : ils savaient que l’on montait, qu’on allait faire la fête après puisque l’on avait invité tout le monde après dans le hall du Parc des Expositions. On avait préparé une surprise avec le t-shirt de la montée, 3 500 t-shirts blancs posés sur tous les sièges de la salle, c’était vraiment très joli. C’était l’une des plus belles ambiances, sans avoir à forcer les choses. Il y a les playoffs de Pro B contre Poitiers aussi, c’étaient des matchs intenables où l’on a un spectateur et qui vient mettre un coup de pied au cul à Pierre-Yves Guillard avant de remonter à sa place (il rit). Je me rappelle avoir dit que c’était totalement interdit, d’avoir envoyé la sécu pour expulser le gars de la salle. C’était un abonné qui venait tout le temps, assis dans la tribune face à la table de marque, et là, dans l’enjeu, il a pété un plomb. Il a descendu les cinq rangées pour aller mettre son coup de pied à Guillard, c’était complètement improbable. Il y avait des énormes ambiances contre Poitiers mais aussi Sylvain Maynier qui se retrouve à faire le match de sa vie contre nous (20 points dans le quatrième quart-temps pour envoyer le PB86 en finale de Pro B en 2008, ndlr).

Amédée-Mercier ou Ékinox ?

Les deux ! Car ce sont deux ambiances totalement différentes. Amédée Mercier, les gens étaient plus proches du terrain, c’était une forteresse. Mais Ékinox, pour moi, c’est l’envol de la nouvelle génération de la JL Bourg. Sans Ékinox, on n’en serait pas là. En termes d’animation, de spectacle, d’ambiance, c’est du haut de gamme. Je fais toutes les salles de Jeep ÉLITE et je peux vous dire franchement que l’on est dans les 6 meilleures ambiances de France. Les deux meilleures, ce sont Limoges et Le Portel, il n’y a rien à dire là-dessus, mais sans être chauvin, nous sommes vraiment dans le Top 6.

Pourquoi ?

Déjà, parce que l’on fait tout pour. C’est un travail d’équipe : j’anime, il y a des gens qui s’occupent de la vidéo, des gens qui s’occupent des lumières… Quand on est passé à Ékinox, on m’a demandé d’évoluer sur ma façon d’animer. Les sons, les jingles, pousser les gens : tout ça, je ne le faisais pas dans l’ancienne salle. Depuis deux ans, il y a une nouveauté : c’est l’utilisation des clap-claps à tous les matchs. Vous allez me dire que ce n’est pas très écolo mais on les recycle tous. Depuis qu’on s’est mis aux clap-claps, il y a beaucoup plus d’ambiance. En fait, Ékinox est une salle tellement bien sonorisée que ça feutre l’ambiance. On est 1 300 de plus et on fait moins de bruit qu’avant… D’où les clap-claps. Les gens tapent machinalement et ça fait finalement un max de bruit. Les gens ont pris leurs habitudes et ça donne une bonne ambiance.

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En octobre 2019, la JL Bourg a honoré Arafat Gorrab pour ses 20 ans au micro (photo : Christelle Gouttefarde)

Alexandre Lacoste