Posté le 4 mai 2023 par La Rédaction

Il garde encore en souvenir cette fois où, tout petit, au club de son papa, il s’était retrouvé sur le dos d’un poney peu conciliant. « Il ne voulait pas aller au pré et s’était sauvé, avec moi dessus ! » Un temps refroidi par l’expérience, Laurent Guillet est vite rattrapé par la passion et l’évidence d’une vie auprès des chevaux. Cavalier hors pair, il est aussi parmi les plus gros pourvoyeurs de champions mondiaux. Et sera, comme de coutume, au rendez-vous du Jumping, du 17 au 21 mai à Bourg.

Composer des couples

« L’équitation est de ces sports où il faut être deux pour pratiquer. » L’homme, et l’animal. Un duo dont l’alchimie se joue bien au-delà du niveau respectif de l’un et l’autre. « Il doit se passer quelque chose ! » Sans quoi le cavalier ne saura pas tirer la quintessence de son partenaire. Ce travail de composition, Laurent Guillet l’appréhende tôt et auprès des plus grands. « Dans une dé- marche très différente. » Avec Michel Robert d’abord, où la faible quantité de chevaux à l’époque permet un investissement poussé à leur côté. Guy Martin ensuite, où le travail est intense, les rencontres nombreuses et passionnantes. Le jeune homme en tire le goût du commerce. Celui, aussi, de rapports humains vrais et durables… Très vite il quitte Villard-de-Lans et rejoint Lent, tout court, où il bâtit son paradis : le Haras de la Côte. Des écuries bien sûr, un terrain enherbé, une carrière, un manège et des paddocks, répartis sur plus de 12 hectares. Un écrin où passent et travaillent des centaines de chevaux repérés, achetés, confiés à d’autres avant que de plus jeunes et plus talentueux ne viennent grossir le catalogue. Le travail est long, parfois aussi source de déception. « Il arrive qu’un cheval n’évolue pas tel qu’on l’aurait ima- giné. » Mais les années passent, et Laurent s’arme de patience… à contre-courant d’un monde et d’un métier où tout doit aller vite et bien. « J’essaie de laisser sa chance à chacun ! Un cheval doit pouvoir gagner en expérience avant d’arriver à maturité. Il faut le construire, et ça ne prend pas le même temps chez tout le monde. » Évidemment, il faut des aptitudes au dé- part: un patrimoine, un modèle, un caractère. « Un crack aura la rapidité en plus. » La rentabilité, donc. Dès 3 ans, les chevaux sont testés. Qualités physiques, écoute et respect du cavalier, sens de l’effort.

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Autant de points, à déceler puis développer jusqu’à l’obtention d’un produit compétitif. « Attention, tous ne deviennent pas champions ! On voit tôt s’ils peuvent prétendre à des épreuves en 135 ou 140, ou à du haut niveau. » Pour autant les chevaux, comme les hommes, peuvent changer. « Et beaucoup passent à côté de leur carrière s’ils ne sont pas confiés à la bonne personne. » Aussi Laurent met-il ses chevaux entre les mains de plusieurs cavaliers Romain Ozzo- la, Mégane Moissonnier et Nicolas Delmotte entre autres pour révéler leur potentiel. Avec une cinquantaine de chevaux à ce jour, dont la plupart sont à vendre, Laurent œuvre sans relâche à leur évolution. Car si certains ne restent ici que quelques jours, d’autres restent des années. « Il faut assurer un roulement pour répondre aux demandes, avec une tendance à plus d’exigence, y compris parmi les amateurs… » Assurant à qui veut l’entendre qu’« il n’y a pas de mauvais cheval », Laurent vise la parfaite adéquation entre un cavalier et sa monture. « C’est une histoire de feeling. On l’a, ou on l’a pas ! » Et c’est en vrai, sur le terrain, auprès de l’animal, que les acheteurs mesurent leur compatibilité. Seuls les chevaux de très bonne qualité peuvent faire l’objet de transactions à distance lors de ventes aux enchères où tout part vite, et très cher. « Dans ce cas, il faut accepter de prendre un risque. » Sinon, il n’y a pas de règle. « Et pas d’argus, c’est justement toute la difficulté ! Il peut y avoir tellement de surprises… » À l’instar de ce cheval, entré chez Laurent lorsqu’il avait 5 ans, resté 15 jours puis revendu et retrouvé à participer aux Jeux olympiques. « On ne sait jamais comment s’écrira l’avenir. Il suffit parfois d’être au bon endroit au bon moment. » Évidemment, le grand rendez-vous de 2024 se prépare en coulisses. « On a un très bon lot de jeunes chevaux, que l’on va tâcher d’amener le plus loin possible. J’ai mis des parts dans un cheval que monte le meilleur cavalier français. On vient aussi d’acheter un très très bon 9 ans pour Nicolas Delmotte… » Le tout, avec humilité, et la tête solidement vissée sur les épaules. « On verra ! »

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