Posté le 30 janvier 2024 par La Rédaction

Le Maradona du tango argentin enseigne son art au Bar à créations à Bourg. Marine Chevrel a suivi un cours.

Vous avez un dieu vivant devant vous, je ne sais pas si vous vous rendez bien compte. » Ainsi Valérie, tanguera depuis 8 ans, me présente-t-elle celui à l’atelier duquel elle s’apprête à participer ce soir-là. Un atelier, dispensé par le maestro Esteban Moreno, argentin, tombé dans la marmite à ses 18 ans, jamais ressorti, imprégné de l’esprit du tango, parfait ambassadeur et pédagogue hors pair. C’est donc auprès d’une pointure, et normalement de sa partenaire Claudia Codega – retournée à Buenos Aires pour les fêtes – que je me suis essayée au tango au Bar à créations… Cours débutants, il va sans dire.

Pas de contact, pas de tango

« S’il n’y a pas de contact alors il n’y a pas de tango », assure Esteban. Le tango n’a pas cessé d’évoluer depuis son apparition il y a près de 150 ans, mais il est un impondérable. Il se danse en couple. Et fait de deux corps un seul être, porté par la musique et l’émotion. Danse populaire, le tango se fonde sur l’improvisation des partenaires qui, au gré de leurs pas, bâtissent leur propre esthétique. Leur art… Art festif par essence, devenu avec le temps objet de performances sportives. Notamment dans le cadre des compétitions de danses standard. Esteban, lui, danse le tango tel qu’il se dansait à Buenos Aires. Tout à la fois ode à la rencontre, rituel de jouissance et langage puissant, le tango offre un traite- ment noble des corps. Sans violence, cliché ni rôle facile. « Plus humain. » Des plus de 30 ans partagés avec Claudia, Esteban cultive une vision du tango qui leur est propre. « Il faut beaucoup de connexions. C’est une relation qui se construit. » Même si, à l’en croire, le mieux pour apprendre est de changer souvent de partenaire. Le danseur devenu professeur a dû faire de son expérience la base d’un enseignement technique. Comparer, détailler, expliquer, y compris ce qui semble évident. « Notre rôle est de faciliter la compréhension – tantôt par l’image ou les mots – de façon à ce que chacun puisse se faire plaisir… Généralement, on y arrive au bout de quelques mois. Improviser, au moins un an ! » Quant à maîtriser complètement, une vie n’y suffirait pas. Le tango est indomptable, et c’est ce qui fait tout son charme.

Pas de tenue exigée

J’ai choisi une jupe héritée du placard de Mamie, une paire de derbies vernies – faute d’avoir en stock, ni même savoir marcher avec des talons – et le chignon des grands jours… Pas de tenue exigée pour venir danser ; simplement de quoi se sentir bien. D’autres sont en jean ou tailleur, à plat ou rehaussés de quelques centimètres. Le premier air lancé au son caractéristique du bandonéon, Esteban reprend les basiques. Et me montre : la position des corps, d’abord à portée de bras, puis le bras gauche dans le dos du partenaire et la main droite dans la sienne. Le doux balancement des corps et, vers l’avant, l’arrière ou le côté selon la volonté du meneur, leur mise en mouvement. La position en avant du buste pour reculer. Les premiers enchaînements ; plusieurs pas d’affilée et, plus dur, le carré.

Maîtrise du bassin

Plus difficile encore, el ocho. Le huit, en français. La maîtrise du bassin, la rotation, le port de tête, le buste encore. Que d’éléments à prendre en compte pour, au gré des changements de partenaire, réussir l’exercice et tenir les 2 ou 3 minutes du morceau de musique. Sans rire ni marcher sur les pieds, en demandant mille fois pardon, en recommençant, en y arrivant parfois. Esteban de venir à la rescousse, détailler l’enchaînement, revenir aux bases. Avancer, reculer, un pas sur le côté, un ocho, reculer à nouveau. Avec lui, c’est facile. « Je fais en sorte que ça te paraisse facile ! » Ça réconforte et m’encourage… Mais la réalité d’un nouvel exercice me rattrape et finit d’anéantir l’espoir d’une maîtrise des pas de tango, si minime soit-elle, au motif de mes quelques années de flamenco il y a 20 ans. « D’autant que ça n’a rien à voir ! » L’aperçu offert par cette heure et demie de pratique est suffisant pour apprécier la gestuelle, adaptée bien sûr au niveau des participants de ce premier créneau ; le second à la suite étant réservé aux danseurs confirmés. J’ai guetté les pieds de mes partenaires, pour anticiper chaque changement de direction. Puis tenté de me laisser porter par le seul poids des corps. Sans vouloir tout contrôler, ni réussir du premier coup. Une belle leçon de lâcher-prise à transposer… « Alors ? » s’enquiert Valérie qui, en l’absence de Claudia, accompagnait Esteban dans la démo des enchaînements à reproduire. Alors c’est beau, vraiment très beau, mais loin d’être évident. Il faut de la patience, beaucoup de patience, et toute la bienveillance de ce dieu vivant qu’est Esteban Moreno pour progresser. Gracias maestro…

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Bar à créations
4, rue d’Espagne à Bourg
Cours chaque mercredi :
Atelier débutants de 18 h 45 à 20 h
Atelier confirmés de 20 h à 21 h 15
Atelier à l’unité : 20 €
Carte 10 ateliers : 190 €
Adhésion à l’association : 20 €


Tango Social Club :
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