Posté le 19 février 2023 par La Rédaction

« Saurez-vous dompter la Trace ? » interrogaient les organisateurs avant le lancement des courses, samedi 18 février… Notre journaliste Marine s’est essayée au plus petit parcours, sur 10 km, au côté de son compagnon Damien et d’un couple de copains. Arrivés aux 136 et 137es places sur 248 avec un chrono à 1 h 07, sinon l’avoir domptée, ils l’ont au moins apprivoisée… 

La première fois que j’ai couru, c’était entre Leymiat et la fromagerie de Poncin sur un chemin d’à peu près 500 mètres. L’assiduité – jamais durable – a permis d’enchaîner 2, puis 5… puis 10 kilomètres. 10 une seule fois. Le tout il y a plus de 5 ans. Sans vraie résolution pour 2023, j’ai rechaussé les baskets début janvier, pour un tour parcouru jusque-là qu’à vélo. En Bresse – soit sur terrain plat, exceptées trois montées totalisant 80 mètres de dénivelé – sur 7 kilomètres. Avec l’objectif, dûment tenu, d’y aller deux fois par semaine. De 7, l’objectif est passé à 9 une fois sur deux. De 9, il est passé à 10 le jour où des copains, inscrits aux 10 km de la Trace des Maquisards, ont proposé d’y participer nous aussi. « C’est que de la descente ! » ils disaient. « Allez, c’est un bon objectif » ils ajoutaient. « Bon, ok » je cédais. Dix kilomètres donc, sans les avoir jamais refaits à l’entraînement… « Tu verras, avec l’effet de groupe, tu les sentiras pas passer. » Soit. Le verdict tombera bien assez vite !

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Le jour J, c’était samedi, avec un départ donné à 21 h depuis le lac Genin. La journée paraît longue, avant le retrait des dossards… Rendez-vous est pris à 19 h à Valexpo. Oliv’ et Aurélie ont déjà chacun leur enveloppe. Eux en sont à réunir assez d’épingles à nourrice pour fixer les dossards, sur la cuisse ou dans le dos, tant que c’est visible… Chaque dossard est équipé d’une balise permettant le check aux points de passage. Sur l’itinéraire des 10, la seule ligne à franchir sera celle d’arrivée. Et ce sera déjà beau ! L’organisation est rodée : à chaque table le parcours correspondant. Direction, donc, celle des 10 où les derniers participants récupèrent leur numéro avant de monter au lac – par la navette ou par leurs propres moyens. Les coureurs des 25, 42 et 100 km sont partis plus tôt et ne reviendront, pour la plus longue distance depuis Ambérieu, qu’au milieu de la nuit. Car tous les parcours sont faits à la seule lumière de la frontale. Encore une chose que je n’avais jamais testée… Vers 20 h 30, le car dépose son flot de voyageurs-coureurs et les voitures se garent autour du lac. Ballet animé et coloré, chacun naviguant ensuite à pied, lumière sur le front, bandes réfléchissantes sur les bras et mollets, vêtements multicolores sur le dos. Certains couverts de la tête aux pieds, d’autres en tee-shirt, short et chaussettes de contention. Des clients mangent à l’auberge quand les quelque 300 coureurs du 10 s’échauffent dehors – et à jeun – en attendant le coup d’envoi.

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L’arche est installée, le speaker donne les consignes de sécurité. La ferveur monte et chacun prend de dernières photos avant de s’élancer. Devant nous, en blouson cuir, des figurants incarnent les maquisards qui 80 ans plus tôt couraient là la peur au ventre. Hommage doublé, en fond, par le Chant des partisans. Partout le long des tracés, l’organisation a tâché de rappeler les événements passés pendant la guerre. Avec, à Cerdon, un arrêt obligatoire au pied du Val d’Enfer. À 21 h, c’est le départ. « Respire bien, pour pas avoir de point ! » Ok. D’autant plus qu’avant le « C’est que de la descente !« , il va falloir grimper un peu ; 130 m de dénivelé. Ça commence plat. Le flot n’a pas encore eu le temps de se disperser… Le sol est humide, mais sans neige ni verglas. Hormis quelques plaques et flaques de boue facilement évitables. La montée arrive lorsque, au lieu de suivre le chemin, le tracé coupe à travers champ – en dévers, donc, pour rejoindre la forêt. Deux personnes tiennent côte à côte, pas davantage. Il faut à la fois respirer et regarder où l’on met les pieds. Avec les racines, c’est facile d’y laisser une cheville. Le chemin coupe la route et s’enfonce un peu plus dans la forêt. « Allez, c’est fini la montée ! » Encouragement ? Non, leurre… Car la montée commence vraiment maintenant, et toutes les bonnes intentions du départ – « Je continuerai de courir en montée » – sont déjà oubliées. Courir, tu parles ! Je marche sur près d’un kilomètre, aussi essoufflée que si j’en avais couru six, avant de couper à nouveau la route. Oliv’ et Aurélie sont devant et nous mettent la distance. À partir de là, d’accord : « C’est que de la descente…« 

Courir à la frontale fait perdre tous les repères. Ceux de temps et d’espace. Si de jour il s’évade, en pleine nuit l’esprit est tout à l’analyse du sol, à l’anticipation des appuis, à la régulation du souffle. Le faisceau de ma lampe est mal réglé, je dois baisser la tête pour y voir clair. Accélérer en même temps, au moins un peu pour compenser le temps perdu à la montée. « Trouve ton rythme et t’arrête pas ! » Je fais comme je peux… Des gens arrivent de derrière en courant ; d’autres devant se mettent à marcher après s’être fatigués ou tordu la cheville sur les nombreux cailloux du sentier forestier. Reste que courir à 300 est bien plus motivant qu’à deux. Balèze, « l’effet de groupe » ! La descente passe plutôt bien et, rapidement, la ville se montre de loin. Le sentier devient étroit, débouche dans un parc et rejoint le plein centre. C’en est fini de la descente ; il faut compter sur l’appât de l’arrivée pour carburer encore et jusqu’au bout. Sur du plat exclusivement, des flèches au sol guident entre les rues pour atteindre Valexpo. Un bénévole installé au dernier passage piétons distribue des bravos à chaque coureur qui passe, avant la haie d’honneur formée par l’équipe des accompagnants devant l’entrée de la salle. Leurre encore, puisque l’arrivée se situe à l’arrière du bâtiment. Courir, souffler, ne pas réfléchir, sinon pour se dire que c’est bientôt terminé…

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Nos derniers pas nous mènent à l’intérieur, via un rideau en lamelles aux couleurs de l’événement. Un tournant, puis deux, le bruit du micro, le monde, les lumières et l’arche d’arrivée. C’est main dans la main, sous les encouragements d’Oliv’ et Aurélie, arrivés quelques minutes avant, que l’on franchit à deux, en 136 et 137es positions, le finish du 10 kil de la Trace des Maquisards. Clic photo, avant que les Cadets de la gendarmerie ne nous remettent un pin’s et le béret emblématiques. Une barre de céréales et un verre de Coca plus tard, on est (un peu) fatigués, mais heureux et fiers d’être arrivés au bout. Entre 22 et 23 h, les arrivées s’enchaînent ; les derniers du 10, et les premiers du 25. Ceux des deux plus grosses épreuves plus tard. La Trace a signé là sa deuxième course avec la volonté de mêler sport et histoire. Performance et souvenir. C’est un succès permis par les équipes de bénévoles, le staff organisateur et tous ses partenaires. Un grand bravo à tous, côté coulisses comme côté course, pour leur engagement.

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